Les Echos ont publié un article aujourd'hui bien documenté sur la situation énergétique aux Etas-Unis, qui devient très tendue, du fait de du développement des datacenters, notamment pour l'IA. Avec beaucoup d’américains qui ont vu leurs factures augmenter de 15 à 20% ces derniers mois.
Et e n'est pas fini, car les producteurs, et les réseaux, vont avoir du mal à suivre la demande croissante due à l'IA dans les années à venir. Et ces producteurs et gestionnaires de réseau ne sont pas aidés par la politique de Trump, et l'augmentation des droits de douane, et la politique anti-immigration, qui augmente le prix d'équipement électriques nécessaires et de la main d'oeuvre.
A mon avis, cela préfigure ce qui va se passer en France avec les projets d'implantation de datacenters pour l'IA gigantesques, avec une consommation électrique démentielle, par exemple le projet devant consommer 1.4 GW, une tranche d'EPR, alors que nos centrales nucléaires sont vieillissantes...
Le boom des data centers met l'industrie électrique américaine sous haute tension
Le réseau électrique vieillissant a besoin d'investissements massifs pour tenir le rythme de l'expansion des centres de données aux Etats-Unis. Les droits de douane et le manque de main-d'oeuvre menacent de faire exploser la facture.
Par Bastien Bouchaud - Publié le 22 sept. 2025 à 07:35Mis à jour le 22 sept. 2025 à 15:49
Le réseau électrique américain va être mis à rude épreuve. L'intelligence artificielle et tous les centres de données qui la font vivre consommeront autant d'électricité que l'équivalent de 20 fois New York d'ici à 2030, à en croire les prévisions de Nema, le lobby américain des fabricants de matériel électrique. Le secteur va représenter le principal vecteur de croissance de la demande d'électricité dans les dix ans, devant les véhicules électriques.
« Les producteurs d'électricité doivent investir dans de nouvelles capacités et moderniser le réseau en même temps, le coût de l'électricité va devenir un problème récurrent », prédit Debra Phillips, la présidente de Nema. « Les résidents de Washington viennent d'être prévenus que leur facture allait augmenter de 18 % », observe-t-elle. Ils ne sont pas les seuls dans ce cas.
Investissements massifs
Plus d'une centaine de producteurs d'électricité ont augmenté leurs prix cette année ou prévoient de le faire l'an prochain, selon un décompte publié par le Center for American Progress (CAP) début septembre. Si toutes ces hausses sont mises en oeuvre, le surcoût s'élèverait à 67 milliards de dollars par an pour les Américains.
Les fabricants de matériel électrique ont eux aussi investi, sans forcément réussir à répondre à toute la demande. Les composants électriques restent difficiles à se procurer, selon la dernière enquête ISM auprès des directeurs d'achats.
Dans l'Etat de New York, la filiale locale d'Iberdrola a demandé à augmenter ses prix de 23 %. Elle évoque des « milliers de kilomètres de câbles, des sous-stations âgées et des poteaux électriques de plus de quarante ans » à remplacer. Les événements climatiques extrêmes, qui provoquent des coupures de courant, n'arrangent rien.
En parallèle, après vingt ans de demande atone, les énergéticiens doivent investir tous azimuts pour espérer tenir le rythme imposé par l'essor des data centers et de la mobilité électrique. Les plans d'investissements massifs de l'ère Biden ont offert une première impulsion.
Les transformateurs électriques taxés
Certaines décisions de la nouvelle administration n'arrangent rien. La croisade de Donald Trump contre les éoliennes réduit les capacités de production d'électricité du réseau. Les droits de douane compliquent la vie des importateurs et pèsent sur leurs marges. L'impact sur les prix a été limité jusqu'à présent (2 % sur les produits distribués par Sonepar depuis le début de l'année). Le matériel électrique répond à des normes locales, il est souvent fabriqué aux Etats-Unis ou au Mexique.
Les transformateurs électriques restent en revanche largement importés. Ils sont essentiels à la modernisation du réseau et à la construction de nouvelles centrales. Leur inclusion dans la liste des produits dérivés en acier ou en aluminium taxés à 50 % devrait coûter 2 milliards de dollars par an, selon Debra Phillips, et ralentir les chantiers. Augmenter les capacités de production aux Etats-Unis n'est pas réalisable à court terme. « Nous ne produisons pas assez de fer doux aux Etats-Unis pour répondre à la demande actuelle », souligne-t-elle.
L'administration Trump est prête à aider l'industrie en simplifiant les normes et en accélérant les revues réglementaires. Le président a créé un Conseil national de la dominance énergétique. Le ministère de l'Energie a lancé une consultation pour mettre en oeuvre les décrets présidentiels sur l'indépendance énergétique du pays. Les projets de remise en service de centrales thermiques sont encouragés. Le gouvernement veut aussi renforcer les interconnexions entre les différents réseaux électriques américains.
Main-d'oeuvre manquante
La présidente de Nema ne perd pas espoir de se faire entendre de la Maison-Blanche. « Cette administration tient aux droits de douane, mais on lui demande de se montrer plus réfléchie, de faire preuve de plus de rigueur », détaille-t-elle. Elle rêverait d'obtenir des crédits d'impôts pour compenser les droits de douane payés à hauteur des investissements réalisés aux Etats-Unis. En attendant, l'organisation professionnelle « essaie d'éduquer l'administration sur l'importance de nos liens commerciaux avec le Canada », ajoute-t-elle.
L'administration semble prête à mettre de l'eau dans son vin. Les droits de douane sur le cuivre n'ont pas été aussi sévères que ne le craignait l'industrie. Les efforts de lobbying du secteur ont permis de limiter la casse. Ce qui donne envie au secteur de voir plus grand. Les opérateurs de réseaux électriques vont créer 500.000 postes supplémentaires pour assurer leurs efforts de modernisation. Les installateurs de matériel électrique estiment avoir des besoins similaires.
La formation initiale et les reconversions ne suffiront pas à trouver suffisamment d'électriciens. Avec ses collègues de Neca, leur lobby à Washington, Debra Phillips espère pousser l'administration à réformer le système d'immigration pour trouver la main-d'oeuvre. « La dernière chose dont a besoin cette administration, c'est que l'on ralentisse les investissements », argumente Debra Phillips. « Nous essayons de leur vendre l'idée en soulignant que le président est le seul qui pourrait jamais y parvenir », glisse-t-elle.