Et de toute façon, il faut toujours assez de centrales nucléaires pour assurer à elles toutes seules, ou presque, l'ensemble de la production (avec l'hydroélectricité, et les centrales au gaz), car pas exemple la nuit, ou même de jour par mauvais temps (cela arrive même au printemps et en été), où le solaire ne produit pas, il faut pouvoir assurer la relève.
La nuit, la consommation est moins importante et l'éolien, lui, produit souvent plus qu'en journée. Mais oui, je suis d'accord avec toi qu'il faut avoir un parc dispatchable qui peut prendre la relève, à la hausse comme à la baisse.
Il faut aussi se mettre sérieusement à piloter la consommation au bon moment, ce qu'on ne fait que trop peu et ce qui ne coûte qu'une fraction du nécessaire en parc batteries / STEP.
On en est conduit comme cela à avoir le double de la capacité qui est nécessaire à un moment donné.
Le triple, même. Mais c'est nécessaire dans tout système électrique qui désire offrir un haut niveau de disponibilité. La puissance nucléaire installée est aujourd'hui de ~64GW en France (et on est en train d'en ajouter un de plus). On a ~26GW d'hydro en puissance installée. Puis il y a tout le thermique non-nucléaire.
On a donc ce qu'il faut aujourd'hui pour couvrir des pointes de 100GW lors des périodes de grand froid, même si on avait pas d'ENR.
Même aujourd'hui, jour férié, à 12h30, le nucléaire représente 55% de notre production. Et c'est une source pilotable qui a un effet de stabilisation sur le réseau.
Et on bride beaucoup de solaire. Je sais que le nucléaire a des contraintes de rampes qui font qu'il n'est pas pilotable très rapidement, mais je suis convaincu qu'on pourrait baisser le nucléaire et intégrer le solaire qu'on bride.
Il faut bien garder à l'esprit que le besoin en stabilisation du système dont on parle est assuré par le marché de réserve et dans une moindre mesure par celui des flexibilités. Sur ce marché, on paye des moyens de production, de stockage et de consommation pour respectivement se tenir prêt à produire, faire du réglage de fréquence et agir sur la consommation à la hausse ou à la baisse.
C'est aujourd'hui un marché différent de celui de la production, même si les moyens de production non-intermittents peuvent y participer.
On peut tout à fait garder les générateurs couplés au réseau (donc tournants, prêts à produire et contribuant à l'inertie) sans les faire produire. C'est ce qui est fait sur une bonne partie du parc hydraulique, d'ailleurs, car cela ne coûte virtuellement rien, apporte de l'inertie au système et garde les turbines prêtes à repartir vu qu'elles restent couplées.
Un des gros avantages des renouvelables c'est qu'elles ne consomment pas de carburant. Il n'y a ni pétrole et gaz à importer, ni uranium à trouver (oui, je sais qu'on aurait pu fermer la boucle et recycler, on a choisi politiquement de ne pas le faire. Je trouve ca triste comme d'autres, mais c'est un fait).
C'est donc majoritairement du capex et un peu (très peu, surtout pour le solaire) d'opex pour l'entretien. On sort donc avec des prix au MWh très bas, qui restent relativement bas si on y ajoute les réserves nécessaires à gérer les intermittences (en tout cas, on est bien en dessous des 100 euros/MWh...).
Ce que n'ont plus nos voisins (à part le gaz et le charbon).
Il y a quand même du nucléaire en Espagne, Suisse, dans les pays nordiques, en Angleterre, bref. C'est surtout l'Allemagne qui s'en est privé.
Peut-être, mais tu minimises beaucoup la situation. RTE parle de situation très tendue sur le réseau à partir de Mars, à cause de la surproduction. Qui ne pouvait que s'accroitre au fur et à mesure que l'on rentrait dans le printemps, puis l'été. Ce n'est pas "Ne vous inquiétez pas, on gère".
Pour moi, encore une fois, cette suproduction est gérée (à la baisse) lorsque c'est nécessaire. Les petits parcs ou ceux qui sont encore sous ancien contrat d'achat reglementé ne réagissent certes pas aux prix du marché, mais le problème va se régler de lui-même avec l'expiration de ces contrats.
De plus, RTE conserve la possibilité de découpler des parcs lorsque c'est nécessaire.
RTE se prononce depuis des années sur le besoin de renforcement des intercos de transport, aussi bien nationales qu'internationales. Il n'est que peu écouté, même si la nouvelle interco avec l'Espagne est une bonne nouvelle. Le marché européen a clairement besoin de plus d'interconnexion avec l'Angleterre, qui pourrait à elle seule absorber une bonne dizaine de GW de solaire ces jours-ci, au vu des prix de leur marché.
Mailler le réseau de transport national nous permettra de réduire la congestion locale (qui n'a pas d'incidence sur la stabilité mais force RTE ou ENEDIS à brider des parcs ENR, comme par ici dans le Morbihan).
Alors oui, je suis d'accord que ce n'est pas une mince affaire. C'est normal, c'est tout le système qui est en mutation.
On va devoir conserver beaucoup plus de moyens de prod en réserve (comme la centrale à charbon de Saint-Avold qui va être convertie en centrale à gaz de réserve, si je ne m'abuse).
On va devoir aligner la conso avec les moments de production.
Et surtout, on va devoir réformer notre marché de l'énergie, et peut-être d'ailleurs renforcer l'obligation de maintenir ou de financer des moyens de réserve par les gros producteurs d'ENR intermittentes.
Mais on est loin, très loin, du black out généralisé selon moi. L'hypothèse selon laquelle l'incident Espagnol aurait été causé par une surprod de PV ou un manque de moyens de prod conventionnels tient chaque jour un peu moins la route, de mon point de vue.