Augmentation du nombre d'heures de prix négatifs au S1 2025 :RTE a publié la semaine dernière son rapport sur l'état du réseau et de la production d'électricité en France au premier semestre 2025.
Cela a aussi donné lieu à un article du site 'Révolution énergétique' :
https://assets.rte-france.com/prod/public/2025-07/Bilan-premier-semestre-S1-2025.pdfhttps://www.revolution-energetique.com/actus/record-de-gaspillage-delectricite-eolienne-et-solaire-en-france/Il montre que le nombre d'heures à prix négatifs a augmenté de 55% au S1 2025, passant à 363 heures à prix négatifs, contre 235h au S1 2021, et seulement 53h au S1 2025. Sur la totalité de l'année 2024, on était à 361h à prix négatifs, on sera donc bien au delà en 2025, l'été n'est pas fini.
RTE indique que par contre en moyenne les prix ont été moins négatifs qu'en 2024, grâce à l'écrêtement en particulier du solaire (on demande à des centrales solaires ou éoliennes d'arrêter leur production au moment où les prix sont les plus bas, en milieu de journée). Ainsi l'écrêtement est passé de 1.1 TWh de capacités de production au S1 2024 à 2 TWh au S1 2025 (+80%). Pour le solaire, c'est un triplement d'écrêtement, passant de 0.4 TWh à 1.2 TWh. On voit nettement l'évolution de ces écrêtements sur des courbes ci-dessous.
Les puissances moyennes écrêtées ont été de 5.3 GW au S1 2025, contre 4.3 GW au S1 2024, et 3.7 GW au S1 2023.
RTE rappelle que cet effacement de production est possible pour les centrales sous contrat de complément de rémunération, pas pour celles qui sont sous obligations d'achat (par EDF). Or, c'est encore 29 GW de capacités qui sont sous obligations d'achat, pour une capacité totale de l'éolien et du solaire de 51 GW.
Je rappelle aussi que cette production perdue est en fait payée quand même au producteur dans les mécanismes de complément de rémunération, ce qui devient aussi de plus en plus cher (on aura peut-être des précisions là dessus de la CRE). C'était supportable quand les volumes étaient peu importants, cela va le devenir de moins en moins quand ils augmentent, surtout dans les conditions budgétaires actuelles.
RTE note aussi, p24, les risques d'un effacement trop brutal de production, qui vu les volumes de plus en plus importants, qui peuvent atteindre 7 GW, peut entrainer des variations importantes de tension et de fréquence. RTE doit se souvenir aussi de l'expérience du blackout en Espagne où 2.2 GW avaient brutalement disparu. Il y a d'ailleurs en encart consacré à cet épisode. RTE indique qu'un nouveau texte de loi doit permettre de mieux étaler ces arrêts.
Les écrêtements de production renouvelable en cas de prix négatifs contribuent à l’équilibre du système, mais ils doivent être bien pilotés pour assurer une bonne gestion de l’équilibre offre-demande au plus près du temps réel.
En effet, l’arrêt ou le redémarrage trop brutal de puissances trop significatives (jusqu’à 7 GW soit environ sept réacteurs nucléaires, en moins de 20 minutes, à la baisse comme à la hausse) peut engendrer des perturbations sur la fréquence du fait de la rapidité de variation de la production, impliquant des risques en exploitation...
...
La loi de finances pour 2025 prévoit plusieurs mesures visant à rendre plus progressifs les arrêts et redémarrages des moyens de production concernés. Les règles de marché de RTE seront également amenées à évoluer pour traiter ce point, en concertation avec les acteurs.Il y a de nombreuses informations intéressantes dans le rapport RTE. Il note par exemple qu'en plus de l'augmentation du nombre d'heures à prix négatifs, on voit qu'elles concernent de plus en plus des jours ouvrables, alors qu'auparavant c'était plutôt réservé aux week-end et jours fériés. 43 jours ouvrés ont vu au S1 2025 au moins une heure à prix négatifs, en milieu de journée.
RTE note aussi qu'il faudra une augmentation des offres d'ajustement, qui sont passées de 0.5 GW au S1 2024, à 2 GW au S1 2025, mais encore insuffisantes, voir p28 :
Les situations de surplus de production, en particulier la nuit, les week-ends, les jours fériés, et de manière croissante, les après-midis en semaine (lorsque la production photovoltaïque est abondante) sont susceptibles d’être fréquentes et d’entraîner des exportations comprises entre 3 et 13 GW. La probabilité importante que les pays voisins rencontrent des situations similaires aux mêmes moments nécessite de bien anticiper ces épisodes au cours de l’été.
Lors de ces épisodes, il conviendra de s’assurer que RTE dispose des marges de manœuvre techniques pour ajuster la production à la baisse lorsque les capacités d’exports ou les débouchés dans les autres pays européens ne sont pas suffisants pour absorber le surplus de production bas-carbone française. Sur le mécanisme d’ajustement, RTE a déjà pu constater un nombre insuffisant d’offres d’ajustement à la baisse pour équilibrer le système électrique. L’extension de l’obligation de participer au mécanisme d’ajustement évoquée précédemment contribuera à y remédier.
Conformément au code de l’énergie, RTE dispose en outre de la possibilité d’ordonner à tout producteur de diminuer sa production à proximité du temps réel (y compris pour des parcs éoliens ou solaire, qui ne disposent d’aucune priorité d’injection en France).
RTE a déjà utilisé à plusieurs reprises cette possibilité et sera susceptible de la mobiliser à nouveau au cours de l’été 2025
Avec l'augmentation des capacités de production solaire et éolienne, en France, mais peut-être encore davantage chez nos voisins européens, cette tendance ne peut que s'accentuer dans les années à venir...