C'est tout simplement honteux. Et en plus ces gens s'augmentent leur salaires.
Concernant la disponibilité du parc nucléaire français, je sais c'est facile de taper sur "ces fainéants de fonctionnaires". On connait la chanson.
On pourrait aussi parler d'autres faits. D'une part, la France a un des plus gros parc nucléaires au monde, grâce à notre centralisation bien connue, qui a permis de lancer un programme d'ampleur dans les années 70, le programme Messmer. Mais ce programme a été arrêté en 1986 après l'accident de Tchernobyl, et avait été bien ralenti après l'arrivée de F. Mitterrand à la présidence en 1981, et la pression déjà des écologistes, avec les manifestations contre la centrale de Plogoff en Bretagne, par exemple, ayant amené à l'abandon du projet.
Ce qui fait que l'on a certainement un des plus vieux parc de centrales au monde, avec la plupart des réacteurs à plus de 40 ans. Le vieillissement du parc entraine plus de pannes, plus de maintenances, plus longues.
D'autre part, comme le programme a été arrêté, on a ensuite très peu embauché. En conséquence les formations en école d’ingénieur ou en université ont aussi été arrêtées pour la plupart. Ce qui veut dire que l'on a perdu des compétences qui nous manquent cruellement maintenant (on le voit par exemple sur le cas des spécialistes en soudures sur aciers spéciaux). Là, pour accélérer la réparation des corrosions sous contrainte, on a fait venir des soudeurs des Etats-Unis, de Westnghouse.
Les problèmes sont aggravés en France par rapport à d'autres pays parce que l'on a beaucoup plus de réacteurs, donc il faut plus de personnels qualifiés. Les sous-traitants qualifiés ont aussi disparu et manquent.
Là, pour relancer le programme nucléaire, et construire six EPR 2, on estime qu'il faut embaucher 100.000 personnes d'ici 2030, et aussi relacer des filières de formation.
Qui est responsable ? On peut penser aux hommes politiques qui n'ont pas anticipé cette situation de vieillissement du parc, en simplement autorisant une exploitation plus longue des réacteurs existants, alors qu'il était prévisible que les pannes se multiplieraient. Mais peut-on véritablement les blâmer alors qu'ils étaient sous une forte pression écologiste et électorale, et n'auraient peut-être pas été élus s'ils avaient défendu une continuation du programme nucléaire ?
C'est facile de taper sur les salariés d'EDF alors qu'ils ont subi cette situation.
Voir La Tribune du 15 Novembre dernier
La filière du nucléaire vise au moins 10.000 recrutements par an d'ici 2030
La filière tricolore du nucléaire devra recruter pas moins de 10.000 à 15.000 personnes par an d'ici à 2030, contre environ 1.500 jusqu'ici, pour espérer réaliser l’immense chantier de relance de l’atome voulu par Emmanuel Macron. Mais le défi s’avère colossal, après des années de baisse d'attractivité du secteur, rongé par un manque critique de compétences.
Marine Godelier, 15 Nov 2022, 18:04
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Centaine de soudeurs nord-américains
De fait, un grand nombre de métiers nécessaires à la relance du nucléaire et à l'entretien du parc existant se trouvent actuellement en tension, des soudeurs aux chaudronniers, en passant par les tuyauteurs, les électriciens, ou encore les ingénieurs de génie civil ou de conception. Le gigantesque plan Messmer de 1974, qui a donné un coup d'accélérateur en France dans le déploiement du nucléaire en France, semble bien loin : aucun nouveau réacteur n'a été mis en service depuis 1999. Une « rupture de charge » longue de plus de vingt ans qui a « beaucoup fragilisé la filière », a lui-même reconnu Emmanuel Macron lors de son fameux discours de Belfort, le 10 février dernier. Et participé à la faire perdre en compétences, notamment après l'accident japonais de Fukushima, en 2011.
La Cour des Comptes pointe ces détériorations dans ses analyses sur la construction du seul EPR en chantier en France, celui de Flamanville, dont la mise en service accumule plus de dix ans de retard. Car pour couler du béton, s'adapter aux nouvelles normes, souder ou encore trouver des fournisseurs, « les difficultés n'ont pas été économiques, mais également industrielles », note la juridiction financière.
"On a perdu du savoir-faire. Le chantier a été chaotique. Avant 2015, il n'était même pas encadré par un chef », expliquait il y a quelques mois à La Tribune Nicolas Golberg, spécialiste des questions énergétiques chez Colombus Consulting."
Enième signe que la France manque cruellement de bras, EDF s'appuie d'ailleurs en ce moment sur une centaine de soudeurs nord-américains pour réparer les réacteurs nucléaires français touchés par des défauts de corrosion.
Connaître le type de postes à créer
Pour rectifier le tir, le Groupement des industriels français de l'énergie nucléaire (Gifen), qui représente la filière, vient de lancer un programme, nommé MATCH. Le but : « permettre de travailler sur l'adéquation entre la charge de projets à venir et les ressources de la filière », explique le vice-président du Gifen, Alain Gauvin. Concrètement, il s'agira d' « analyser les plus de 80 métiers » utiles au secteur, afin de connaître précisément le type de postes à créer sur la décennie. Toujours en préparation, le programme sera présenté « autour de mars 2023 », date à laquelle le Gifen devrait également communiquer sur le nombre exact de salariés qu'il faudra à filière d'ici à la fin de la décennie.
Néanmoins, le Gifen n'a pas attendu les annonces d'Emmanuel Macron sur la construction de 6 EPR pour se mettre en ordre de marche. Et a d'ores et déjà terminé l'étape préalable à MATCH, en dressant un état des lieux des compétences qui seront utiles au nouveau nucléaire, dans le cadre d'un Engagement de développement de l'emploi et des compétences (EDEC) décroché auprès de l'Etat. Electriciens industriels, chaudronniers, mécaniciens spécialistes des machines tournantes ou encore soudeurs : y est explicité « le nombre de personnes qualifiées pour chacun de ces emplois et où elles se situent géographiquement, tout en prenant en compte la notion d'âge et d'expérience pour faire de la prospective », expliquait il y a quelques mois à La Tribune sa déléguée générale, Cécile Arbouille.
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