Auteur Sujet: 5G: SFR pourra déployer son réseau Huawei (La Réunion)  (Lu 1285 fois)

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5G : SFR pourra déployer son réseau Huawei à la Réunion malgré l'opposition d'Orange
Jamal Henni

Sur l’île, le gouvernement a autorisé SFR à déployer un réseau Huawei mais pas Orange, qui a contesté le feu vert accordé à son rival, mais sans succès.

La polémique sur l’utilisation des matériels de Huawei en France connaît un rebondissement inattendu à la Réunion. SFR a décidé de commander au constructeur chinois un réseau 5G sur l’île. En juillet 2021, il a obtenu une autorisation du gouvernement en ce sens. Mais ce feu vert n’a pas été du goût d’Orange, qui s’était vu interdire d’utiliser le constructeur chinois sur le même territoire un an plus tôt. L’ex-France Télécom a donc attaqué en référé l’Etat, qui est pourtant son premier actionnaire avec 23% du capital. Le 22 décembre 2021, le tribunal administratif de Paris a donné raison à l’opérateur historique, et suspendu le feu vert accordé à SFR.

Mécontents, l’opérateur au carré rouge et le gouvernement ont fait appel devant le Conseil d’Etat. La plus haute juridiction vient d'adopter la position inverse du tribunal administratif: elle a donné raison à SFR et au gouvernement, et donné tort à Orange. Les juges du Palais Royal n’ont pas examiné les arguments de fond, mais se sont prononcés seulement sur la forme : ils ont jugé qu’Orange n’était pas légitime pour contester une décision qui n’a pas été rendue à son encontre, mais à l’encontre de SFR.

Inversement, le tribunal administratif avait estimé qu’Orange avait intérêt à agir. Sur le fond, le tribunal avait jugé que le gouvernement avait “méconnu les principes d’égalité et de libre concurrence”, car SFR et Orange sont “dans une situation analogue, sans que ne soit établi un motif permettant de justifier une différence de traitement”.

Le tribunal administratif avait aussi estimé que le feu vert accordé à SFR a des “effets anticoncurrentiels”, en procurant à l'opérateur détenu par Patrick Drahi “un avantage susceptible d'affecter durablement la structure concurrentielle du marché de la téléphonie mobile à la Réunion”. En effet, “en raison des autorisations délivrées à SFR d'exploiter des matériels Huawei pour le déploiement de son réseau 5G, celui-ci sera plus [vite] opérationnel que celui d’Orange. Le retard d’Orange est de nature à priver Orange d'une part importante du marché des services 5G lors du lancement des propositions commerciales 5G. Ce désavantage concurrentiel n'est pas causé par un choix stratégique d’Orange, mais résulte directement de la décision [du gouvernement] en tant que cette décision crée une situation de distorsion de concurrence”.

Lors de la procédure, le gouvernement n’a aucunement justifié son “deux poids, deux mesures” à la Réunion, mais il s’explique peut-être parce que les utilisateurs sensibles (police, administrations…) utilisent le réseau Orange et pas celui de SFR.

Rappelons que le gouvernement a adopté en 2019 une loi lui permettant d’interdire les équipements Huawei dans les réseaux mobiles. Une loi qui vise surtout SFR et Bouygues Telecom, qui utilisent le constructeur chinois sur 52% et 47,5% de leur réseau respectivement, selon les chiffres communiqués par la Fédération française des télécoms. Pour sa part, Orange utilisait Huawei uniquement à la Réunion et Mayotte, et à l’international (Espagne, Afrique…).

En pratique, le gouvernement a décidé d’interdire les équipements Huawei au cas par cas, plutôt dans les villes, tandis qu’il continue à les autoriser dans les campagnes.

Concrètement, cette interdiction oblige l’opérateur à démonter ses équipements chinois pour en installer de nouveaux. Une opération qui coûte environ 100.000 euros par antenne. SFR a indiqué lors d’une procédure que 8.000 antennes étaient concernées, soit un coût de 800 millions d’euros. Toutefois, SFR pourra déplacer à la campagne les antennes démontées en ville. Et de toute façon, SFR aurait dû mettre au rebut les antennes plus anciennes pour entretenir le réseau. Au final, le nombre d’antennes à remplacer effectivement sera donc très inférieur. Plus modestement, le réseau d’Orange à la Réunion comprend 430 antennes, soit un coût de 43 millions d’euros. L'opérateur historique a décidé de déployer à la place un réseau Nokia, qu’il utilise déjà en métropole.

Pour mémoire, la Réunion compte quatre opérateurs mobiles: Orange, SFR (via sa filiale SRR), Telco Oi (filiale de Free et du groupe Hiridjee), et Zeop Mobil (groupe Océinde de la famille Goulamaly). En 2020, SRR a réalisé un bénéfice de 29,5 millions d’euros sur un chiffre d’affaires de 191 millions.

Contactés, l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI, qui accorde les autorisations) n’a pas répondu, et Orange s’est refusé à tout commentaire. En septembre 2020, la patronne d’Orange France Fabienne Dulac avait déploré l’interdiction de Huawei pour son réseau de la Réunion: “cela nous paraît excessif car nous avons une longue histoire avec Huawei à la Réunion et à Mayotte, et il nous faudra donc remplacer tous nos équipements sur ces territoires”, avait-elle déclaré lors d'un point-presse.

capital.fr